jeudi 5 janvier 2012

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0 Le Franc Biya est-il possible?

Par Paristocrate:
La dernière rumeur sur une la possibilité d’une dévaluation du franc CFA semble avoir ranimé le débat sur la possibilité d’avoir notre propre monnaie. Ce que je voudrais, c’est qu’ensemble, que nous essayons de répondre à cette question.

En réalité, tout État peut avoir sa monnaie quand il le souhaite et dans les quantités qui lui plait. Par exemple, le Cameroun pourrait se retirer de la zone CFA et par le truchement de la « BCC »-Banque Centrale du Cameroun- créer autant de monnaie fiduciaire qu’il souhaite. Il le ferait en imprimant billets et pièces, puis en procédant à une expansion de la base monétaire. Il n’y a donc rien de vraiment complexe dans la création de la monnaie en elle-même.

Cependant, si nous avons une monnaie, une monnaie qu’aucun de nos partenaires commerciaux n’acceptent comme instrument d’échange, à quoi est-ce que cette monnaie servirait-elle? Ne serions-nous pas dans la même situation qu’aujourd’hui ? Ne serions-nous pas obligés de dépendre d’une autre monnaie pour faire du commerce ?

Il ne suffit donc pas de créer de la monnaie, il faut encore et surtout, que nos partenaires commerciaux l’acceptent comme moyen/outil d’échange.

Si on est d’accord sur ce constat, la question que nous devons nous poser n’est pas celle de savoir si le Cameroun peut avoir sa monnaie, mais celle de savoir si l’Etat camerounais, de manière indépendante, a la capacité de créer une monnaie acceptable et acceptée par ses partenaires commerciaux.

Pour répondre à cette question, il est important de commencer par définir ce qu’est c’est la monnaie.

La monnaie est un réservoir de valeur utilisé comme un instrument d’échange; C’est une dette de l’Etat émetteur sur les détenteurs nationaux et internationaux de sa monnaie scripturale et fiduciaire.

Partant de ce qu’est la monnaie, il ressort que pour qu’une monnaie soit viable, elle doit être remplir un certain nombre de préalables : Elle doit être perçue comme un réservoir fiable de valeur(1) ; elle doit être acceptée comme instrument d’échange(2) ; Ses détenteurs doivent avoir plus ou moins l’assurance que l’Etat émetteur sera en mesure de payer sa dette externe en devise (4) et de payer sa dette interne en maintenant la stabilité des prix(5).

Commençons par le (1) : Supposons que le Cameroun crée sa monnaie et elle s’appelle le franc Biya. Qu’est-ce qu’il faudrait pour qu’elle soit perçue comme un réservoir viable et fiable de valeur ?

Pour que la monnaie soit un réservoir de valeur, elle doit pouvoir soit conserver sa valeur avec le temps, soit prendre de la valeur avec le temps. La monnaie conserve sa valeur lorsque son pouvoir d’achat reste constant, et elle prend de la valeur lorsque son pouvoir d’achat augmente.

Le pouvoir d’achat de la monnaie reste constant lorsque les prix n’augmentent, ni ne baisent, c’est-à-dire quand l’inflation est nulle; le pouvoir d’achat de la monnaie augmente lorsqu’il y’a une baisse généralisée des prix, c’est-à-dire quand il y’a désinflation ou déflation. Par contre, le pouvoir d’achat de la monnaie baisse, lorsqu’il y’a une augmentation généralisée des prix, c’est-à-dire, lorsqu’il y’a inflation.

Il découle donc ceci : pour que la monnaie camerounaise soit un réservoir de valeur, le Cameroun doit être capable et doit donner l’assurance aux détenteurs de sa monnaie, qu’il prendra les mesures nécessaires pour contrôler et éviter une échappée de l’inflation en interne, et maintenir la Parité du Pouvoir d’Achat « PPA » avec ses partenaires commerciaux en externe.

Pour savoir si l’Etat camerounais est capable de tenir cette promesse, il est nécessaire de savoir quelles sont les sources de l’inflation.

En aval, l’inflation est tirée par la demande lorsqu’elle est supérieure à l’offre. Et en amont, l’inflation est tirée par les coûts. L’inflation est tiré par la demande lorsque la masse monétaire est supérieure à sa quantité efficiente et/ou lorsque qu’il y’a inflation dans les autres pays du monde- c’est-à-dire lorsque nous exportations augmentent pour toutes nos catégories de produits- en d’autre terme, lorsque la demande est supérieur a l’offre.

Et, l'inflation est tirée par les coûts lorsque les prix de certaines commodités augmentent ou lorsque l’économie continue de croitre même après que le plein emploi ait été atteint.

Cependant, puisque nous parlons de création de la monnaie, l’inflation qui nous intéresse, c’est celle qui est tirée par la demande, c’est-a-dire par la masse monétaire ou par la demande externe.

Puisque nous n’avons pas de véritable contrôle sur la demande externe, à la question de savoir qu’est-ce qu’il faudrait pour que notre monnaie nationale- le Franc Biya- soit un réservoir de valeur, la réponse est la suivante : Il faut que la politique monétaire de la Banque Central du Cameroun, aussi régulièrement que possible, puisse veiller à ce que la masse monétaire en circulation dans le système, ne soit pas plus large qu’il n’en faut.

Mais cette réponse pose une autre question : Qu’est-ce qu’il faudrait pour que la BCC puisse maitriser, contrôler et réguler le niveau de la masse monétaire dans notre système ? Pour y répondre, voici une liste non-exhaustive.
i. Il faudrait avoir des statistiques en continue et si possible en temps réels sur la situation de l’économie, pour des agrégats tels que l’emploi, la croissance, la productivité…etc ;

ii. Il faudrait que les économistes de la BCC soient des économistes qui comprennent et connaissent la réalité de notre économie- pas des économistes comme le professeur Tsafack qui sans avoir froid aux yeux, affirme que le Cameroun a eu 5% de croissance sur ces 50 dernières années, ce qui est faux ;

iii. Il faudrait que la BCC puisse être indépendante et à l’abri des influences politiques ;

iv. Il faudrait que les investisseurs soient rassurés sur l’intégrité des dirigeants de la BCC et qu’ils aient confiance en leur capacité intellectuelles ;

v. Il faudrait que les investisseurs soient convaincu que l’instabilité politique ne déraillera pas la stabilité monétaire ;

vi. Il faudrait que le secteur formel représentent la majorité des transactions commerciales et non qu’elle soit détenue par l’informel ;

vii. Il faudrait que les banques prennent le dessus sur les tontines ;

viii. Il faudrait réduire ou au mieux, éradiquer la thésaurisation ;

ix. Il faudrait embrigader la BCC et ses dirigeants par une brigade anti-corruption.

Voilà quelques des éléments qu’il nous faut pour maitriser, contrôler et réguler la masse monétaire.

Quand vous regardez cette liste, pensez-vous que le Cameroun dispose de tout ou de la plupart de ces éléments ? Pensez-vous qu’il soit capable de les mettre en place dans de brefs délais ?

Si vos réponses aux questions ci-dessus sont : non, non, alors vous êtes de ceux qui pensent que le Cameroun ne peut pas encore, dans les conditions actuelles, créer une monnaie qui puisse être un réservoir de valeur. Si vos réponses sont oui, oui, alors vous êtes soit un menteur, soit un simple ignorant des réalités de notre pays.

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