vendredi 23 avril 2010

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0 L'Afrique sub-saharienne et le grand éffondrement du commerce

De Voxeu.org par: Nicolas Berman et Philippe Martin
[Anglais]
Le faible développent financier de l’Afrique sub-saharienne signifiait que les banques n’étaient pas directement engagées dans la crise du crédit. Mais cet article met en garde de ne pas se réjouir. Si le coût du faible développement c’est que les exportateurs africaines sont très dépendantes des financements du commerce extérieur, alors le vrai coût de la crise mondiale sur l’Afrique pourrait en réalité être plus élevé.

La vue au début de la crise mondiale était que la faible intégration financière de l’Afrique était une bénédiction déguisée. D’ailleurs, il est certain que l’effet de richesse direct a été plus faible que dans les autres régions telles que l’Asie de l’Est, l’Amérique Latine, les pays de l’Europe du centre et orientale lesquels sont plus ouverts aux flux financiers que les pays d’Afrique.

Mais pendant que la décision prise par les banques Africaines de ne pas acheter des actifs « toxiques » a fourni des abris, le continent peut avoir été frappé durement par d’autres canaux de transmissions. L’effondrement du commerce a frappé plus durement les pays d’Afrique (Baldwin 2009, Draper and Biacuana 2009, and Kandiero and Ndikumana 2009)

Une indication de cette vulnérabilité est donnée par les statistiques du commerce des Etats-Unis entre 2008 et 2009. Suite à la crise, la chute des importations Américaines en provenance des pays d’Afrique a été la plus large que celles en provenance des autres pays. Cela est particulièrement vrai pour les exportations des produits manufacturés des pays africains. Ceci suggère que la baisse des exportations de l’Afrique est non seulement un effet de composition en raison de l’importance des produits primaires et la baisse des prix des produits primaires. Cela soulève les questions suivantes :

Quelle est l’origine de cette chute brutale des exportations africaines vers les Etats-Unis ?

Qu’est-ce qu’elle révèle sur la vulnérabilité des exportateurs Africains aux crises financiers dans les pays partenaires?

Quels sont les mécanismes par lesquels une crise financière dans un pays partenaire affecte les exportations africaines ?

Dans un article récent (Berman and Martin 2010), nous tentons de répondre partiellement à ces questions en analysant l’impact des crises financières passées sur les flux commerciaux bilatéraux. En utilisant des données sectorielles pour le commerce bilatéral pour la période 1972-2002, et une approche d’équation de gravité, nous quantifions la déviation des exportations de leur niveau « naturel » générée par la crise financière.

Nous avons distingué deux mécanismes par lesquels une crise financière dans un pays affecte les exportations d’un pays partenaire.

L’effet de revenu (les crises financières sont typiquement associées à de fortes récessions qui conduisent à une baise de la consommation et des importations). Nous constatons que les exportations africaines sont plus sensibles aux grands mouvements négatifs sur le revenu dans les pays avec lesquels ils échangent. Cela est vrai tant pour les exportations des produits fabriqués et les exportations des matières premières.

Deuxièmement, pour une baisse donnée du revenu et de la demande, les exportations africaines peuvent être négativement touchées par une crise financière due à ce que nous appelons un effet de perturbation. L’effet de perturbation peu prendre des formes directes ou plus subtiles. L’effet le plus direct, celui qui a largement été débattu dans les cercles politiques, c’est la chute du crédit commercial qui rend le commerce international plus couteux (see Amiti and Weinstein 2009 and Chor and Manova 2010).

Il y’a cependant des moyens plus subtiles par lesquels la crise financière peut affecter négativement le commerce. En particulier, bien qu’il soit difficile de le mesurer, l’aversion pour le risque augmente entre les banquiers et les commerçants pendant une crise financière et cela peut affecter plus gravement le pays ou groupes de pays qui sont considérés comme plus risqués.

Comme le montre la figure 1, nous constatons que l’effet de perturbation sur le commerce est plus important (au moins 20% plus large) et plus durable pour les pays Africains que pour les exportateurs des autres régions. Encore une fois, cet effet de perturbation vient s’ajouter à la chute des exportations due la chute des revenus et de la consommation. Cette forte divergence s’applique à la fois pour les matières premières et les produits manufacturés. Nous constatons également pour les pays Africains, l’effet de perturbation le plus grand vient quand le pays de destination qui est frappé par une crise financière est industrialisé


Figure 1. Les exportation après une crise financière dans un pays partenaire, Afrique
Note: la figure 1 montre la déviation des exportations de l’Afrique sub-saharienne après une crise financière qui a eu lieu au courant de l’année t=0, au regard de la moyenne des effets de perturbations. Un ratio d’excédent commercial positive (négative), signifie que l’effet de la crise financière dans le pays partenaire sur les exportations Africaines est plus positive (négative) que l’effet moyen sur les exportations. Source: Berman and Martin (2010).

Enfin, nous avons également enquêté si cette vulnérabilité provident de la forte dépendance des pays Africains du crédit commercial.

Le rôle du financement du crédit commercial
Nos résultats suggèrent que cette dépendance exerce un rôle important dans l’élaboration de la réaction des exportations africaines vers les pays expérimentant une crise financière. En effet, l’effet de perturbation se trouve être négative et importante dans les pays Africains qui sont plus dépendent du financement commercial.

Une interprétation possible est que, pendant la crise financière, quand l’incertitude est grande, la confiance et la liquidité sont faibles, les banques et les entreprises dans le pays importateurs commencent par éliminer l’exposition et le crédit à certains pays qui sont vus comme plus risqués. Cette situation affecte en particulier le financement du commerce par le biais des lettres de crédit ou l’importateur paie l’entreprise exportatrice à l’ avance. Il est également probable que pendant la crise financière, les institutions financière « renationalisent » leur opérations et réduisent leur exposition aux banques et entreprises étrangères.

Les exportateurs dans les pays ayant un système financier solide peuvent être en mesure de mieux résister au retranchement des banques étrangères. De toute évidence, pour les entreprises Africaines qui sont plus dépendantes des financements étrangers, cette option peut ne pas être faisable. A ce stade, les interprétations de nos résultats ne sont que provisoires et plus de recherches doivent être faites pour mieux comprendre l’origine de la fragilité particulière des exportations Africaines aux crises financières dans les pays industrialisés.

Nos résultats peuvent être considérés comme contredisant la conclusion politique implicite qui est venu au début avec la sagesse conventionnelle. Le sous-développement des systèmes financiers en Afrique n’est pas une « bénédiction déguisée » dans le cas de la crise actuelle. Si le coût d’un tel sous développement est que les exportateurs Africains sont très dépendants du financement du commerce extérieurs, alors le coût réel de la crise financière sur l’Afrique peut en réalité être plus élevé à cause du sous-développement des systems financiers.


References
Amiti, Mary and David Weinstein (2009), "Exports and financial shocks: New evidence from Japan", VoxEU.org, 23 December.
Baldwin, Richard (ed.), The Great Trade Collapse: Causes, Consequences and Prospects, VoxEU.org, 27 November.
Berman, Nicolas and Philippe Martin (2010) “The vulnerability of Sub-Saharan African countries to financial crises: the case of trade”, CEPR Discussion Paper 7765
Davin Chor Kalina Manova (2010), “Off the cliff and back? Credit conditions and international trade during the global financial crisis”, VoxEU.org, 15 February.
Draper, Peter and Gilberto Biacuana (2009), “Africa and the trade crisis”, in Richard Baldwin (ed.), The Great Trade Collapse: Causes, Consequences and Prospects, VoxEU.org, 27 November.
Kandiero, Tonia and Léonce Ndikumana (2009), “Supporting the World Trade Organization Negotiations: Looking Beyond Market Access”, in Richard Baldwin (ed.), The Great Trade Collapse: Causes, Consequences and Prospects, VoxEU.org, 27 November.


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